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La géothermie, une source d'énergie négligée

La géothermie, une source d'énergie négligée

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La géothermie, une source d'énergie négligée

Alors que la loi de transition énergétique fixe à 40 % la part d’énergies renouvelables dans la production électrique d’ici 2030, quelle place occupe la géothermie ? Dans un avis écrit, Martin Pontal, spécialiste des captages géothermiques, déconstruit les idées reçues sur cette source d’énergie. Lors d’un entretien, il nous en dit davantage sur le potentiel de cette dernière en France, où ses installations sont bien plus adaptées que l’on imagine.

La géothermie est basée sur un principe simple : capter l’énergie présente dans le sol et s’en servir pour alimenter la température d’un bâtiment. L’énergie captée peut être transférée par le biais d’une pompe à chaleur (PAC) géothermique, d’un plancher chauffant voire d’un ventilateur. Contrairement aux idées reçues, la source d’énergie est disponible via différents procédés de captages et sur différents territoires.

Comme l’explique d’ailleurs Martin Pontal*, expert en captages géothermiques pour Elydan, groupe spécialisé dans le transport d’énergies : « A la différence des énergies fossiles, la géothermie est présente sous tous les sols et adaptée à tous les climats. Il faut cependant différencier ses différents types d’exploitation : la géothermie de surface, la géothermie profonde à basse énergie et la géothermie profonde à haute énergie ».

Une énergie facilement exploitable en France

La géothermie ne se concentre pas uniquement dans les zones volcaniques et thermales. Par exemple, dans toute la France, la géothermie de surface est applicable, nécessitant une simple déclaration sur environ 88 % du territoire métropolitain. Ainsi, en 2019, 164 039 PAC géothermiques ont pu être déjà̀ installées. Cependant, l’installation dépend également de la nature du sol, et de sa capacité à supporter les profondeurs. Les zones montagneuses, comme en Alsace, sont très réceptives à ce type d’installation, mais elles ne sont pas les seules.

 

« Chaque typologie de sol possède une conductivité thermique différente (argile, sable, rocheux...), d’où l’utilité de faire une étude de sol. Avant d’effectuer une installation de plusieurs sondes (au-delà de 1000m forés), il est nécessaire de faire un test de réponse thermique (TRT), afin de dimensionner correctement le captage géothermique », précise Martin Pontal. L’étude se déroule notamment dans le cadre de la réalisation d’un champ de sondes, lors d’une opération de géothermie verticale, afin d’optimiser le dimensionnement du captage enterré.

Une fois la conductivité du terrain confirmée, l’installation peut commencer, entre définition de l’emplacement et préparation du dispositif du collecteur. Sans compter les étapes intermédiaires : préparation du forage, forage avec la profondeur préalablement définie, libération du forage, déroulement de la sonde dotée de capteurs et du tube d’injection, injection du coulis géothermique dans le cinquième tube...

Martin Pontal ajoute toutefois : « Il n’y a pas de notion d’équilibre mais de respect des sols et de conservation de l’énergie locale disponible » La profondeur du captage doit donc s’adapter à ces critères et laisser place à différents types de géothermie, comme les capteurs horizontaux ou les corbeilles géothermiques.

Des risques maîtrisables

Au-delà de déterminer quel type de capteur à privilégier pour tel ou tel sol, une étude permet d’anticiper d’éventuels risques environnementaux occasionnés par la géothermie de surface. Afin de fonctionner, le dispositif doit « capter des calories dans le sol. Si on capte toutes ces calories, le sol se « gêle » », expose Martin Pontal. Un phénomène pouvant, en cas de mauvaise mise en oeuvre, à la fois polluer le sol, dégrader le paysage tout en provoquant des mouvements sols néfastes pour le bâti.

Petite précision cependant du spécialiste des captages géothermiques, la géothermie de surface atteint des profondeurs allant de 10 à 300 mètres. Or : « En dessous de 10 mètres, rappelons que le sous-sol est à une température constante d’environ 15°C, disponible 24h/24, gratuitement par simple échange », nuance-t-il*. De plus, en ce qui concerne la géothermie de surface horizontale, un respect d’espacement entres tubes est à respecter : on parle souvent de 20 fois le diamètre du tube.

Selon Martin Pontal, grâce à cette stabilité thermique : « La géothermie permet de chauffer le bâtiment en période froide, et de rafraîchir ce bâtiment en période chaude, le sol étant à une température quasi-constante toute l’année ». Dans son avis écrit*, il défend même que le procédé « permet de produire 50 à 70kw de froid pour 1kW d'électricité́ et le rafraichissement peut fonctionner en continu, sans variation excessive des températures et sans nuisances (dont le bruit ...) ». Une panoplie de fonctionnalités qui le rend adaptable à toute catégorie de bâti, qu’il soit neuf ou existant, dédié au résidentiel, tertiaire, agricole, comme industriel, ou bien établi en maison individuelle comme en bâtiment collectif.

De la rentabilité au long-terme

Forte de son adaptabilité, la géothermie a aussi la particularité de directement consommer là où elle est produite, en ne stockant ni rejetant de substances polluantes. « Ses performances sont indépendantes des variations du climat et participent à sa préservation », évoque également Martin Pontal*. Ainsi, selon l’Association française des professionnels de la géothermie (AFPG), une PAC géothermique produirait en moyenne quatre fois moins de chaleur qu’elle n’en consommera. Pour un même taux de chauffage généré, la géothermie émettrait quatre fois moins de gaz à effet de serre que l’électricité et cinq fois moins que le gaz. La production de chaleur géothermique a permis de réduire ces émissions d’environ 252 millions de tonnes.

Face à ces innombrables qualités, pourquoi la solution décarbonée peine à conquérir le cœur du grand public ? Sûrement la technicité demandée par l’installation d’un chauffage géothermique, qui exige en outre un certain investissement financier, oscillant entre 15 000 € et 25 000 €. En revanche, d’après Martin Pontal*, le système « est deux fois moins onéreux que le gaz de ville, trois fois moins que le fuel, quatre fois moins que le gaz propane, et cinq fois moins que l'électricité ». Il continue : « La géothermie de surface est le système qui obtient la plus longue durée de vie (les PAC sont très robustes et ont une durée de vie moyenne d’environ 17 ans, celle des capteurs enterrés est d’environ 50 ans) avec un retour sur investissement des plus intéressant ». D’autant qu’il faut prévoir en moyenne sept ans, afin de rentabiliser l'investissement, qui peut être allégé par des aides financières (MaPrimeRénov’, Prime Effy, l’éco-PTZ...)

Malgré cela, la géothermie occupe, avec les résidus agricoles, le solaire thermique et énergies marines, seulement 3,6 % de la production d'énergies renouvelables en France durant l'année 2020 Une situation qui refléterait une « méconnaissance » ou un manque de « conviction » des pouvoirs publics vis-à-vis de cette source d’énergie, commente Martin Pontal. Pourtant, les multiples experts de la géothermie (bureaux d’études, fabricants, installateurs) se sont déjà mobilisés dans le but valoriser la source d’énergie au plus grand nombre, notamment à travers des qualifications comme Quali’forage.

La pédagogie, c’est le maître mot de Martin Pontal pour interpeller sur le potentiel de la géothermie. Cette dernière pourra alors sûrement jouer un rôle central dans la loi de transition énergétique, qui, à l’horizon de 2030, prévoit 40 % d’énergies renouvelables dans la production électrique, contre 23 % en 2019.

*Source : Avis d’expert de Martin Pontal intitulé La géothermie de surface : du mythe à la connaissance

 

Source : batiweb 16/09/2021

Photo : www.futura-sciences.com